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Sécurisation de l'emploi : du dialogue social à la loi

Sécurisation de l’emploi : du dialogue social à la loi

Les choses étaient annoncées depuis l’été dernier lors de la Grande Conférence sociale des 9 et 10 juillet 2012, conférence pendant laquelle le Gouvernement a souhaité renvoyer aux partenaires sociaux le soin de négocier des accords interprofessionnels sur deux thèmes spécifiques : le contrat de génération et la sécurisation des emplois.

Sur ce dernier point, après l’aboutissement le 11 janvier 2013 des négociations interprofessionnelles, ce fut au tour des Parlementaires de reprendre le flambeau et de traduire dans la loi, leur vision de la sécurisation de l’emploi.

L’objectif, définir un dispositif de « flexisécurité » à la française. Ainsi, vingt-sept articles de la loi du 14 juin 2013 ont repris ou complété les éléments préalablement négociés dans le cadre de l’accord interprofessionnel.

Nous choisissons ici d’en détailler certains aspects susceptibles de concerner particulièrement les entreprises de travaux agricoles et forestiers.

  • Généralisation de la couverture complémentaire collective « santé »

Premier article, premier principe, la flexisécurité côté « sécurité » consacre la généralisation de la couverture complémentaire collective « santé » visée dans l’accord ANI. Pour arriver à cet objectif, un calendrier d’ouverture de négociation pour les branches a été fixé au 1 juin 2013, puis à défaut, pour des accords d’entreprise au 1er juillet 2014. En tout état de cause, l’employeur devra faire bénéficier à ses salariés d’une couverture minimale santé au 1er janvier 2016.

Négociée sur la base d’un socle minimal à partir d’une mise en concurrence préalable, la couverture complémentaire doit être conforme à la définition des contrats solidaires et responsables. La prise en charge de son coût doit également prévoir une répartition égalitaire entre l’employeur et le salarié.

Bénéficiant d’un accord spécifique national et d’accords locaux, la branche production agricole sera néanmoins amenée à renégocier certains points.

Par ailleurs, la loi prévoit l’amélioration de la portabilité des couvertures « santé » (à compter du 1er juin 2014) et « prévoyance » (à compter du 1er juin 2015) à 12 mois maximum. Ainsi, pour les salariés devenant demandeurs d’emploi, l’extension s’appliquera pendant une durée égale à la période d’indemnité chômage et dans la limite de son dernier contrat de travail.

  • Taxation des contrats courts

Nous l’imaginons aisément, la taxation des contrats courts fut le théâtre d’âpres négociations qui ont retardées la conclusion de l’ANI. Il s’agissait là d’instaurer une majoration sur le montant de la cotisation employeur au régime d’assurance chômage pour les contrats à durée déterminée.

Ainsi, l’accord interprofessionnel porte une majoration de la cotisation patronale d’assurance chômage de 7% pour les contrats d’une durée inférieure à un mois; 5,5 % pour les contrats d’une durée comprise entre 1 et 3 mois et 4,5 % pour les contrats d’une durée inférieure à 3 mois.

Sont concernés ici, les contrats conclus notamment pour accroissement temporaire d’activité et dans certains secteurs recourant au contrat d’usage. En revanche, sont épargnés les contrats conclus pour remplacement, de même que les contrats correspondants aux emplois saisonniers.

La loi quant à elle permet désormais de moduler les taux à l’intérieur de la convention d’assurance chômage. Cette convention a été signée le 29 mai et applicable au 1er juillet 2013.

  • Les droits rechargeables

Concernant les droits à l’assurance chômage, les nouvelles dispositions visent à l’amélioration des droits d’indemnisation des salariés, notamment les plus précaires qui alternent les petites périodes d’emploi et de courtes périodes d’indemnisation.

Ainsi, la notion de droit rechargeable permet de ne pas pénaliser les chômeurs qui retrouvent un emploi puis reviennent au chômage, en leur donnant la faculté de conserver des droits à indemnisation non consommés lors de la première période de chômage et de les cumuler avec ceux nouvellement acquis.

  • Une durée minimale pour les temps partiels

Les nouvelles dispositions de la loi relatives aux salariés à temps partiel fixent désormais la durée minimale du contrat à vingt-quatre heures par semaine ou à son équivalent mensuel. Cependant, une durée de travail inférieure pourra être fixée à la demande du salarié soit pour lui permettre de faire face à des contraintes personnelles, soit pour lui permettre de cumuler plusieurs activités afin d’atteindre une durée globale d’activité correspondant à un temps plein ou au moins égale à la durée de 24 heures hebdomadaire.

De même, un accord de branche étendu pourra également fixer une durée de travail inférieure à condition de comporter des garanties de mise en œuvre d’horaires réguliers ou permettant au salarié de cumuler des activités. Les horaires des salariés doivent dans ces cas être regroupés sur des journées ou demi-journées.

Par ailleurs, les organisations liées par des accords professionnels devront ouvrir une négociation sur les modalités d’organisation du temps partiel dès lors qu’au moins un tiers de l’effectif de la branche professionnelle occupe un emploi à temps partiel.

  • Accord de maintien dans l’emploi

Fortement discuté lors du précédent gouvernement à travers le dossier des accords « compétitivité emploi », le législateur permet désormais aux entreprises connaissant de graves difficultés conjoncturelles, de conclure un accord majoritaire de maintien dans l’emploi.

Applicable pendant deux ans maximum, ce type d’accord est présenté comme un « nouvel outil à disposition des partenaires sociaux pour éviter les licenciements en cas de dégradation de la conjoncture économique ».

Ainsi, l’entreprise s’engage à maintenir les salariés dans l’entreprise en échange d’une baisse de rémunération (au-delà de 120 % du SMIC), de la durée du travail ou encore une modification des modalités d’organisation du travail.

Individuellement, les salariés peuvent refuser les nouvelles conditions négociées. Le cas échéant le licenciement sera considéré comme un licenciement individuel pour motif économique.

  • Contentieux du travail

Au moment de la phase de conciliation, il est possible, à l’initiative d’une des parties ou sur proposition du Bureau des conciliations de mettre fin au litige portant sur la contestation d’un licenciement. Dans ce cas, l’employeur devra verser une indemnité forfaitaire sur barème en plus des indemnités légales ou conventionnelles de licenciement.

Par ailleurs, la loi raccourcie à deux ans au lieu de cinq (sauf exceptions), le délai permettant toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail. Celui-ci démarre du jour où celui qui exerce l’action a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit. Les actions en paiement ou en répétition du salaire sont quant à elles ramenées à un délai de trois ans.

Erwan CHARPENTIER

e-charpentier@e-d-t.org